Canada, Mexique, Chine et bientôt l'UE, Trump dégaine l'arme des droits de douane
Promettant de signer dès samedi un décret imposant des droits de douane sur les produits canadiens, chinois et mexicains, le président américain Donald Trump a laissé entendre que l'Union européenne devrait être bientôt concernée à son tour.
"Est-ce que je vais imposer des droits de douane à l'Union européenne? Vous voulez la vraie réponse ou la réponse diplomatique? Absolument. L'UE nous a très mal traités", a déclaré Donald Trump à des journalistes dans le Bureau ovale de la Maison Blanche.
Quant à la Chine, le Canada et le Mexique, il a assuré qu'ils ne pouvaient "rien" faire pour empêcher que les droits de douane soient appliqués à leurs produits, citant notamment les semi-conducteurs, le gaz et le pétrole ainsi que l'acier. Certains pourraient entrer en vigueur dès le 18 février, a-t-il ajouté.
Il a cependant précisé que le pétrole canadien, qui représente 60% des importations américaines en la matière, pourrait être un peu moins taxé: "Je vais sans doute baisser les droits de douane dessus. Nous pensons les limiter à 10%".
Plus tôt dans la journée, sa porte-parole Karoline Leavitt avait déjà affirmé qu'il n'y aurait pas de marche arrière de dernière minute, Donald Trump accusant les deux pays voisins ainsi que Pékin de ne pas lutter suffisamment contre le trafic de fentanyl et l'immigration illégale vers les Etats-Unis.
"Le président va imposer demain 25% de droits de douane sur le Mexique, 25% de droits de douane sur le Canada et 10% de droits de douane sur la Chine pour le fentanyl illégal qu'ils produisent et dont ils permettent la distribution dans notre pays", avait déclaré Karoline Leavitt.
Le Premier ministre canadien démissionnaire, Justin Trudeau, a répondu que son pays était "prêt à une réponse immédiate" si cette menace se matérialise.
- "Plan A, B et C" du Mexique -
De son côté, la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum a souligné être en discussion avec le gouvernement Trump et avoir "avancé sur différents sujets". "Des accords sont trouvés tous les jours", selon elle.
Mais "nous avons un plan A, B et C" en cas de droits de douane imposés par les Etats-Unis, a assuré Claudia Sheinbaum en conférence de presse, sans apporter de détails.
Jusqu'au dernier moment, le Canada et le Mexique, théoriquement protégés par un accord de libre-échange avec les Etats-Unis, avaient espéré éviter une telle issue.
Le ministre canadien de la Sécurité publique, David McGuinty, est même venu jeudi à Washington présenter les contours d'un plan visant à renforcer la frontière entre les deux pays.
Insuffisant néanmoins dans l'esprit de Donald Trump, qui, sur un autre dossier, reproche aussi à Pékin d'aider les cartels mexicains à produire le fentanyl, l'opioïde qui fait des ravages aux Etats-Unis, en permettant aux principes actifs d'être exportés depuis la Chine.
Durant son audition de confirmation devant le Sénat mardi, le candidat de Donald Trump au poste de secrétaire au Commerce, Howard Lutnick, avait justifié la politique du président en parlant d'un "acte de politique intérieure" qui vise "simplement à les pousser à fermer leurs frontières".
"Je sais qu'ils agissent rapidement. S'ils font ce qu'il faut, il n'y aura pas de droits de douane", avait assuré Howard Lutnick.
- Pékin pourrait en "bénéficier" -
Plusieurs éléments restent cependant inconnus: quelle sera la portée des droits de douane - ciblés ou généralisés - et quel outil légal Donald Trump emploiera pour justifier la décision.
La mesure pourrait ouvrir la porte à des recours, tant en justice, de la part des Etats concernés ou d'entreprises américaines affectées, que dans le cadre des procédures de règlement des conflits prévus dans le cadre de l'accord ACEUM liant Washington, Ottawa et Mexico.
L'impact économique de ces mesures pourrait être important pour les quatre pays.
Selon Oxford Economics, l'économie américaine risque de perdre 1,2 point de pourcentage de croissance tandis que le Mexique pourrait plonger dans la récession.
Wendong Zhang, professeur à l'Université Cornell, envisage pour sa part un choc moindre pour les Etats-Unis et plus marqué pour le Canada et le Mexique.
"Dans un tel scénario, le Canada et le Mexique peuvent s'attendre à voir leur PIB reculer respectivement de 3,6% et 2%, les Etats-Unis de 0,3%", a-t-il ainsi estimé.
Pékin aussi "souffrirait d'une escalade de la guerre commerciale existante, mais bénéficierait en même temps (des tensions entre les Etats-Unis), le Mexique et le Canada".
D.Nelson--RTC