Election présidentielle en Macédoine du Nord, l'avenir européen au coeur des débats
Les bureaux de vote ont ouvert mercredi en Macédoine du Nord pour le premier tour de la présidentielle avec en toile de fond une question déterminante pour l'avenir du pays: accepter ou non les conditions posées par l'Union européenne pour pouvoir y entrer.
La vie politique dans cet Etat des Balkans d'1,8 million d'habitants est engluée depuis des années dans des discussions sur l'opportunité ou non de se plier à ces exigences de l'UE et surtout de la Bulgarie voisine.
Cette dernière a d'abord insisté pour que la langue macédonienne soit considérée comme un simple dialecte bulgare, ce que Skopje a refusé. Puis, dans un deuxième temps, elle a réclamé l'inclusion de la minorité bulgare dans la Constitution, au risque de faire échouer les négociations en vue d'une adhésion à l'Union européenne de la Macédoine du Nord.
- Réviser la Constitution ? -
Les deux principaux candidats à la présidence de ce pays - qui a déjà dû changer de nom pour mettre fin à un conflit avec un autre voisin, la Grèce - ne sont pas d'accord sur la réponse à donner à Bruxelles.
Stevo Pendarovski, le président social-démocrate candidat à sa réélection, qui est à la traîne dans les sondages avec 16% des intentions de vote, veut immédiatement réviser la Constitution pour faire avancer les négociations avec l'UE en vue de son intégration, à laquelle la Macédoine du Nord est candidate depuis 2005.
"Au cours de mon premier mandat, nous avons réglé une question capitale, celle de l'adhésion à l'Otan", a déclaré ce professeur d'université de 61 ans pendant la campagne. "Je crois qu'au cours de mon prochain mandat, nous réussirons à clore tous les chapitres avec l'UE. Ce ne sera pas facile mais cela signifiera une plus grande prospérité".
En tête dans les sondages avec 26% des intentions de vote, Mme Gordana Siljanovska-Davkova, sa principale concurrente, soutenue par le principal parti de droite, VRMO-DPMNE, veut attendre que son pays devienne membre de l'UE avant de modifier la loi fondamentale.
"S'il suffisait de réviser la Constitution pour entrer dans l'Union européenne, nous y serions déjà", a balayé d'un revers de la main cette femme de 71 ans pendant la campagne électorale, promettant de "ne pas oublier les intérêts nationaux".
"Unissons la nation, construisons un consensus", a-t-elle lancé lors de son dernier meeting de campagne. "Ce n’est qu’ensemble que nous pouvons nous rendre fiers. Et surtout, faire de ce petit Etat, un Etat européen respecté".
A la précédente élection, en 2019, Stevo Pendarovski l'avait emporté au second tour sur Gordana Siljanovska-Davkova.
- Répétition générale -
Au-delà d'un référendum sur la posture à adopter face à l'UE, le premier tour sera surtout une occasion de déterminer le rapport de force entre les différents partis avant le 8 mai, la date à la fois du second tour et des législatives.
"Vu le calendrier, le premier tour de l'élection présidentielle sera surtout une répétition générale pour les élections législatives du 8 mai et permettra d'évaluer le poids des principaux partis politiques", explique à l'AFP Ana Petruseva, éditorialiste et directrice de l'ONG BIRN.
A côté des deux principaux candidats, on trouve cinq autres prétendants, dont Bujar Osmani, le ministre des Affaires étrangères, candidat du parti albanais DUI, et Arben Taravari, soutenu par une coalition de trois partis baptisée "Vlen" ("Ca vaut la peine").
Leur appui ou non au second tour sera crucial, "en particulier le soutien des partis albanais", souligne Mme Petruseva.
Pour la majorité des citoyens, il faut surtout que le pays cesse de voir partir sa jeunesse.
"La situation est de plus en plus intenable, les jeunes partent et nous nous demandons qui va rester ici, comment nous allons travailler", résume Sanja Jovanovic-Damjanovska, une employée de l'administration publique. "J'espère que celui qui gagnera travaillera à améliorer notre niveau de vie et à offrir un meilleur avenir à la jeunesse",
"Je veux que la Macédoine intègre l'Europe, pour qu'on ait du travail, pour que les gens travaillent", confie Faik Kurtis, un charpentier. "Que les jeunes ne partent plus à l'étranger, qu'ils restent ici, dans leur propre pays."
P.Batteux--RTC