Les "francophones du Sud", avenir de TV5MONDE selon son PDG sur le départ
L'avenir de TV5MONDE "passe par l'inclusion de pays francophones africains", selon le PDG de la chaîne, Yves Bigot, qui assure dans un entretien à l'AFP ne pas être amer de quitter la chaîne.
L'ancien journaliste a annoncé sa démission surprise cinq mois avant la fin de son mandat à la tête de la grande chaîne généraliste francophone, alors qu'il se trouvait en déplacement mardi à Washington.
Mais il nie tout ressentiment de ne pas avoir été reconduit par ses ministères de tutelle, celui de la Culture et celui des Affaires étrangères.
"Je ne suis pas fâché du tout. (...) Si j'étais fâché, je partirais tout de suite", affirme l'homme de 68 ans, dont la démission sera effective fin juin.
Pourquoi ne pas avoir attendu que son mandat s'achève cinq mois plus tard? L'attribution des postes dans l'audiovisuel "ça se passe pendant l'été", justifie-t-il, "il faut avoir son job en septembre".
"Le plus simple pour moi, ça aurait été de pantoufler jusqu'à fin novembre en profitant de mes notes de frais pour inviter (...) mes employeurs potentiels à bouffer sur l'argent des contribuables", lance Yves Bigot, en répétant qu'il veut surtout éviter le moindre "conflit d'intérêt".
"Je pense que d'ici le 30 juin, mon successeur sera nommé", ajoute-t-il.
Le plan stratégique 2025-2028 "est rédigé, il est chiffré", "la clôture des comptes 2023 a été validée", et "je serai présent pour l'Assemblée générale annuelle du 17 juin".
"Tout sera en ordre, tout sera nickel", affirme-il.
- Tournée en Afrique -
D'ici son départ il va se rendre au Sénégal, pour s'entretenir avec le nouveau président Bassirou Diomaye Faye. Avec cette rencontre, il aura bouclé un tour de sept pays d'Afrique appelés, selon un projet en préparation, à entrer au capital de TV5MONDE.
Les six autres pays sont le Bénin, la Côte d'Ivoire, le Cameroun, le Gabon, la République démocratique du Congo et le Congo-Brazzaville.
Certains en France se sont inquiétés du piètre bilan en termes de droits humains de quatre de ces Etats.
Mais Yves Bigot appelle à évoluer sur la question. "On ne pourra pas éternellement être les francophones du Nord qui nous adressons aux francophones du Sud", souligne-t-il, en référence aux sociétés audiovisuelles publiques de France, Belgique, Suisse, Canada et principauté de Monaco qui détiennent TV5MONDE.
"Simplement dire (aux pays africains) +on ne veut pas de vous parce que vous n'êtes pas parfaits ou vous n'êtes pas exactement comme nous+, je ne crois pas que ça fasse avancer beaucoup les choses", dit-il.
A l'opposé, "les amener à entrer dans notre univers, moi je pense que c'est vertueux, au contraire ça peut et ça doit les amener à évoluer par rapport à leur propre situation intérieure".
Le dirigeant de TV5MONDE reconnaît que cela ne sera pas simple, même si le projet est porté par les Etats bailleurs de fonds actuels.
"Peut-être qu'il y a un moment où ça va coincer, peut-être qu'ils ne vont pas tellement apprécier aussi de voir qu'ils se font traiter de dictateurs, je peux vous dire, il y a déjà deux des présidents que j'ai rencontrés qui m'ont dit +dis-donc la presse française elle n'a pas l'air de beaucoup nous aimer+", confie-t-il sans préciser de quels chefs d'Etat il s'agit.
Selon Yves Bigot, le projet africain ne fera pas l'objet d'une signature au sommet de la Francophonie, organisé les 4 et 5 octobre à Villers-Cotterêts, dans le nord de la France, tout au plus d'une annonce. "On ne sera absolument pas prêts, ni juridiquement, ni politiquement".
L.Rodriguez--RTC