Législatives: Macron appelle au "rassemblement" pour vaincre les "deux extrêmes"
"Une bataille des valeurs" contre les "extrêmes". Emmanuel Macron a appelé mercredi à un large "rassemblement" autour de sa majorité pour défaire à la fois la France insoumise et le RN, justifiant avec "gravité" la convocation d'élections législatives anticipées.
Après sa décision dimanche de dissoudre l'Assemblée nationale, qui a surpris jusque dans son camp, le président de la République a martelé qu'il s'agissait d'un choix de "clarification". Refusant "l'esprit de défaite", il s'est défendu de vouloir "donner les clés du pouvoir à l'extrême droite en 2027".
"Le sursaut, c'est pour maintenant", a-t-il ajouté, estimant qu'il fallait interrompre un processus en train de "se faire sourdement", celui de l'accession au pouvoir du RN.
Il a ajouté qu'il ne souhaitait pas débattre, avant ces législatives du 30 juin et 7 juillet, avec Marine Le Pen, après l'avoir pourtant proposé lors de la campagne des européennes.
- "Alliances contre-nature" -
Quelques jours après des résultats catastrophiques aux européennes, où l'extrême droite a engrangé près de 40% des voix, il n'a retenu ses coups ni contre le RN ni contre La France insoumise, "deux blocs", "deux extrêmes", a-t-il répété dans son propos liminaire.
Il intervenait pour la première fois dans la campagne pour ces élections qui auront lieu les 30 juin et 7 juillet. Pour bien marquer la différence avec ses fonctions exécutives, la conférence avait été organisée dans une salle du centre de Paris et pas au Palais de l'Elysée.
A l'appui de ce débat sur les valeurs, Emmanuel Macron a accusé La France insoumise d'"antisémitisme" et d'"antiparlementarisme", fustigeant le mouvement de Jean-Luc Mélenchon pour avoir "créé un désordre parfois constant" et "inquiétant" à l'Assemblée nationale.
L'alliance "Front populaire" en cours de constitution entre le PS, le PCF, les Ecologistes et La France insoumise est "indécente", a-t-il dénoncé, disant avoir eu "une pensée ces 24 dernières heures pour Léon Blum" dans un de ses nombreux appels du pied à l'électorat socialiste de Raphaël Glucksmann. La gauche a en effet choisi de donner le nom "front populaire" à son alliance électorale.
Réagissant à chaud à un "flot de paroles, d'injures, et de mépris" du chef de l'Etat, Jean-Luc Mélenchon a regretté qu'Emmanuel Macron "s'enfonce dans la stratégie du chaos et de la guerre des religions pour brutaliser l'élection".
Quant au RN, le président a fustigé ses ambiguïtés à l'égard de la Russie, sa volonté de "sortir de l'Otan" et son discours contradictoire sur les retraites.
"Les masques tombent", a-t-il lancé, en évoquant aussi le ralliement du patron des Républicains Éric Ciotti au Rassemblement national.
"Bricolages d'appareils", "alliances contre-nature", ce ne sont selon lui "en aucun cas des majorités pour gouverner".
En face, il a affiché une "volonté sincère et humble de bâtir des consensus et de tisser des compromis" grâce à l'aide des "sociaux-démocrates" d'une part, de la droite républicaine de l'autre. Il a évoqué une "fédération de projets pour gouverner", à charge pour les partis de la majorité présidentielle d'entamer des discussions avec d'autres formations politiques.
Peut-être pour encourager les élus de gauche et de droite, M. Macron a annoncé pèle-mêle la suppression d'un échelon territorial, éventuellement l'abandon des grandes régions, "un grand débat sur la laïcité", le maintien de l'indexation des pensions de retraites sur l'inflation.
Il a également souhaité l'interdiction des téléphones portables aux enfants de moins de 11 ans et confirmé vouloir huit nouveaux réacteurs nucléaires. Il s'est également dit "ouvert" sur les "modalités" d'application de la réforme très contestée par la gauche de l'assurance-chômage.
- Accord à gauche -
Le chef de l'État s'exprimait en présence de son gouvernement et des chefs de la majorité, à l'exception d'Édouard Philippe qui a estimé mardi "pas complètement sain" que le président s'implique trop dans la campagne.
Au cours de sa conférence de presse, il a du reste reconnu sa "responsabilité" dans l'échec de son camp face à l'extrême droite.
Et au sein de la majorité, les voix sont très nombreuses qui souhaiteraient voir le chef de l'Etat qui cristallise toutes les critiques, se mettre en retrait de la campagne, lui préférant Gabriel Attal pour mener la bataille.
Pendant l'intervention du président, le PS a confirmé mercredi dans un courrier à ses militants qu'un "accord de principe" avait été trouvé entre les différents partis de gauche pour répartir les circonscriptions le 30 juin. LFI aura 229 candidatures, le PS 175, EELV 92 et le PCF 50.
"Le travail essentiel sur le programme est toujours en cours de discussion" et il n'y aura "aucune concession sur nos valeurs", ont précisé dans ce courrier les responsables socialistes Pierre Jouvet et Sébastien Vincini.
La question de la personnalité qui mènera la campagne demeure également ouverte, le cas Mélenchon, accusé notamment d'ambiguïtés sur la question de l'antisémitisme crispant une partie de la gauche.
De leur côté, les Républicains sont en pleine gestion de crise. Un bureau exécutif a été convoqué à 15H00 au siège du parti pour procéder à l'exclusion du président Éric Ciotti, qui a appelé à s'allier au Rassemblement national pour les législatives. Une conférence de presse est prévue juste après ce bureau auquel le député des Alpes maritimes, qui compte bien conserver son poste, a annoncé qu'il ne se rendrait pas.
A.Jonsson--RTC