Mongolie : le Premier ministre revendique la victoire aux législatives
Le Premier ministre de Mongolie Luvsannamsrain Oyun-Erdene a revendiqué la victoire de son parti aux législatives de vendredi, disant qu'il avait conservé la majorité absolue au Parlement malgré la lassitude de la population face à la corruption et à la situation économique.
"Selon les résultats préliminaires, le Parti du peuple mongol (PPM) a entre 68 et 70 sièges", sur un total de 126, a affirmé samedi le chef du gouvernement au cours d'une conférence de presse à Oulan-Bator, la capitale.
Il a fait cette annonce quelques heures après la fermeture - à 22H00 (14H00 GMT) - des bureaux de vote, à l'issue du comptage de 100% des bulletins mais avant la proclamation des résultats officiels.
Parmi les plus petites formations, celle de centre droit anticorruption HUN dispose désormais de huit sièges. Ses candidats, à l'aise avec les réseaux sociaux, ont joui d'un important soutien au sein des classes moyennes urbaines.
Quant au taux de participation, il a été de 69,3%, selon la Commission électorale.
"Tout indique une majorité réduite de députés" du parti au pouvoir par rapport aux précédentes législatives, "avec une performance étonnamment grande" du Parti démocrate, a commenté auprès de l'AFP Julian Dierkes, professeur à l'Université de Colombie-Britannique (Canada) et spécialiste de la politique mongole.
"La participation relativement forte suggère également un désir de changement", a-t-il en outre jugé.
Le Premier ministre, dont le parti disposait déjà, depuis 2016, de la majorité absolue à l'assemblée, a de son côté dit après le vote qu'il espérait que les législatives de vendredi ouvriraient "une nouvelle page" dans le "débat démocratique".
Car les inquiétudes restent vives à l'égard d'un pouvoir d'achat mis à mal par l'inflation (elle est actuellement de 7%) et par le sentiment d'une corruption généralisée dans ce vaste pays très peu peuplé (3,4 millions d'habitants) au regard de ses voisins que sont la Chine et la Russie, mais riche en ressources naturelles.
- Créer "plus d'emplois" -
Dans un bureau de vote de la banlieue d'Oulan-Bator, Tsagaantsooj Dulamsuren, une caissière de 36 ans enceinte de son quatrième enfant, a confié à l'AFP qu'elle attendait des politiques qu'ils "développent davantage les infrastructures" et "créent plus d'emplois dans l'industrie manufacturière pour les jeunes".
Dans la région rurale de Sergelen, à plus d'une heure de route de la capitale, un responsable local de 45 ans, Batsaikan Battseren, a pour sa part regretté la faible participation des jeunes.
"Les jeunes de 18 à 30 ans ne vont pas voter", a constaté cet ancien éleveur portant un vêtement traditionnel mongol.
Dans les rues d'Oulan-Bator, où vit la moitié de la population du pays, les innombrables affiches de propagande électorale représentaient tout le spectre politique, des libéraux jusqu'aux nationalistes, en passant par des hommes d'affaires populistes et des écologistes.
Dans un monde politique mongol largement dominé par les hommes, les partis étaient tenus par la loi de veiller à ce que 30% de leurs candidats soient des femmes.
- Recul de l'Etat de droit -
Pendant le mandat à la tête du gouvernement de Luvsannamsrain Oyun-Erdene, la Mongolie a fortement chuté dans le classement de l'ONG Transparency International, qui repose sur l'indice de perception de la corruption.
Selon ses détracteurs, la liberté de la presse et l'Etat de droit ont également reculé ces dernières années.
Au point que plus d'un tiers des Mongols pensent désormais que leur pays "se transforme en dictature", selon la fondation Sant Maral, le principal institut de sondage indépendant.
Et ce alors qu'"il y a encore 10 ans, la Mongolie était respectée en tant que démocratie libérale", a déclaré à l'AFP l'analyste politique Bayarlkhagva Munkhnaran.
Considéré comme le successeur du Parti communiste qui a gouverné ce pays d'une main de fer pendant près de 70 ans, le PPM reste toutefois populaire, en particulier dans les campagnes et auprès des personnes âgées.
R.Collins--RTC