Russie: le chef de l'AIEA souligne le danger posé par les combats près de la centrale de Koursk
Le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, a sonné l'alarme mardi, lors d'une visite sur place, sur le danger posé par la proximité de la centrale nucléaire de Koursk avec les combats entre les armées ukrainienne et russe.
"Une centrale nucléaire de ce type si proche du point de contact ou d'un front militaire est un fait extrêmement grave", a-t-il déclaré au cours d'un déplacement dans la région russe frontalière de Koursk, où les forces ukrainiennes ont lancé une offensive surprise il y a trois semaines.
Rafael Grossi a affirmé avoir pu visiter "les parties les plus importantes" de la centrale, qui se trouve à moins de 50 kilomètres des combats.
L'infrastructure fonctionne dans "des conditions très proches de la normale", a-t-il dit.
Mais c'est précisément parce qu'elle fonctionne que les conséquences d'un impact pourraient être "sérieuses", a souligné Rafael Grossi.
"Cela peut sembler simple et relever du bon sens: n'attaquez pas une centrale nucléaire", a plaidé le responsable.
Depuis le début de l'offensive russe en Ukraine il y a deux ans et demi, l'agence met régulièrement en garde contre le risque d'accident nucléaire dû aux combats à proximité de centrales.
L'attention et l'inquiétude se concentraient jusqu'à présent sur la centrale de Zaporijjia, dans le sud de l'Ukraine, dont les troupes russes se sont emparées en mars 2022.
Mais, il y a trois semaines, le 6 août, l'Ukraine a lancé une vaste offensive transfrontalière dans la région russe de Koursk.
Les troupes de Kiev assurent depuis continuer à avancer en territoire russe, tandis que celles de Moscou disent progresser dans l'est de l'Ukraine.
La Russie insiste, depuis, sur le risque d'une catastrophe nucléaire en cas d'attaque ukrainienne sur la centrale de Koursk, située à une soixantaine de kilomètres de la frontière ukrainienne.
Le président russe Vladimir Poutine a assuré la semaine dernière que l'Ukraine avait tenté de frapper le site.
L'AIEA dit avoir été informée par la Russie de la découverte de fragments de drones à une centaine de mètres d'une infrastructure de stockage de combustible usagé de la centrale.
Rafael Grossi a déclaré mardi que des "signes de l'impact" de drones lui avaient été montrés.
- Particules radioactives -
Dans un communiqué, Rafael Grossi avait affirmé lundi vouloir "évaluer de façon indépendante ce qui se passe" à Koursk.
Bâtie à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest de la ville de Koursk, capitale régionale où résident environ 440.000 personnes, la centrale dispose de six réacteurs, dont deux en cours de construction.
Sur les quatre autres, deux sont à l'arrêt et deux sont entièrement opérationnels. Ils sont du même type que ceux de Tchernobyl, en Ukraine, sans dôme de protection.
L'accident nucléaire de Tchernobyl en 1986, considéré comme le pire de l'Histoire, a contaminé de vastes zones surtout en Ukraine, au Bélarus et en Russie. Une grande partie du reste de l'Europe a également subi des retombées radioactives.
Selon Tariq Rauf, ancien fonctionnaire de l'AIEA, ces types de réacteurs ont depuis lors fait l'objet d'"améliorations significatives en matière de sécurité".
Rafael Grossi, lors de sa visite mardi, a jugé qu'il était "exagéré" de comparer Koursk à Tchernobyl. "Mais c'est le même type de réacteurs, et il n'y a pas de protection spécifique", a-t-il dit, rappelant les conséquences potentiellement graves qu'aurait une attaque.
- "Retenue" -
Pour Robert Kelley, ancien directeur des inspections pour l'agence, "la possibilité d'un incident de type Tchernobyl avec un réacteur qui explose et brûle pendant des jours est de zéro".
La situation reste toutefois dangereuse, selon lui: une frappe pourrait par exemple toucher les infrastructures de stockage de combustible usagé, ce qui libérerait des gaz et particules radioactifs.
Après le début de l'offensive ukrainienne dans la région de Koursk, l'AIEA avait appelé à "la plus grande retenue" pour éviter un accident nucléaire".
Kiev dit aujourd'hui contrôler près de 1.300 km2 et 100 localités dans cette région, où plus de 130.000 personnes ont fui les combats et les bombardements, selon les autorités régionales russes.
Pour l'instant à l'arrêt, la centrale ukrainienne de Zaporijjia a, quant à elle, été la cible de frappes répétées dont la Russie et l'Ukraine se sont rejeté la responsabilité.
E.Reyes--RTC