Vaste opération militaire israélienne en Cisjordanie, neuf Palestiniens tués
Israël a lancé mercredi une opération militaire de grande ampleur dans le nord de la Cisjordanie occupée, où neuf Palestiniens ont été tués, tous des combattants selon l'armée israélienne, en marge de la guerre qui se poursuit à Gaza depuis près de onze mois.
Les forces israéliennes ont "éliminé neuf terroristes armés" à Jénine, Toubas et Tulkarem, dont sept dans des raids aériens, a annoncé l'armée dans un communiqué. Le Croissant-Rouge palestinien a fait état, lui, de "neuf morts" et au moins 15 blessés dans ces attaques, revoyant à la baisse son bilan précédent de 10 morts.
Selon le Hamas, trois morts dans le camp de réfugiés de Jénine sont des membres de sa branche armée.
A Gaza, les bombardements israéliens depuis les airs, la mer et le sol sont ininterrompus depuis l'attaque meurtrière du Hamas en Israël le 7 octobre. Mais en Cisjordanie, des opérations coordonnées des troupes au sol appuyées par des aéronefs opérant dans plusieurs villes au même moment sont rares.
Un porte-parole de l'armée israélienne a néanmoins relativisé l'importance de l'opération, indiquant qu'elle n'était pas "extrêmement différente [de l'ordinaire] ou spéciale".
Selon l'agence officielle palestinienne Wafa, le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a interrompu une visite officielle en Arabie saoudite pour rentrer "suivre les développements de l'agression israélienne" en Cisjordanie.
A la mi-journée, ils verrouillaient les entrées des villes et des camps, ont constaté des photographes de l'AFP, des soldats tirant à intervalles réguliers sur les camps d'où s'échappaient des sons de tirs et d'explosions.
Dans les rues désertées par les habitants, les bulldozers israéliens détruisaient la chaussée, l'armée assurant déterrer des bombes posées en bord de route. Des ambulances circulaient, après avoir été contrôlées par des soldats.
- "Signal dangereux" -
Mostafa Taqataqa, gouverneur de Tulkarem, a dit à l'AFP voir dans ces raids "un signal dangereux et sans précédent".
"L'armée (israélienne) a détruit le réseau d'infrastructures du camp Nour Shams et l'a coupé de la ville et de ses environs. Il est clair que (les Israéliens) ont un plan qui vise (...) tous les camps de Cisjordanie, tout semble indiquer que cette opération va durer", a-t-il ajouté.
Les incursions israéliennes dans des zones autonomes palestiniennes sont quotidiennes en Cisjordanie même si, au titre des accords de paix israélo-palestiniens (moribonds) d'Oslo, l'armée israélienne n'est pas censée entrer dans ces zones placées sous le contrôle exclusif de la Sécurité préventive de l'Autorité palestinienne.
Depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, déclenchée par l'attaque sanglante du mouvement islamiste palestinien en Israël le 7 octobre, les violences en Cisjordanie, occupée par Israël depuis 1967, se sont nettement intensifiées.
Plus de 600 Palestiniens y ont été tués par l'armée israélienne ou des colons juifs, selon des données officielles palestiniennes, et au moins 20 Israéliens parmi lesquels des soldats ont péri dans des attaques palestiniennes ou lors d'opérations de l'armée en zone autonome palestinienne, selon les données officielles israéliennes.
Ces dernières semaines, les opérations israéliennes en Cisjordanie se sont concentrées sur le nord de ce territoire, où les groupes armés en lutte contre Israël sont particulièrement actifs depuis bien avant le début de la guerre de Gaza.
- "Infrastructures irano-islamistes" -
L'armée veut "démanteler les infrastructures terroristes irano-islamistes" en Cisjordanie, a affirmé sur X le ministre israélien des Affaires étrangères, Israël Katz, appelant à agir en Cisjordanie "avec la même détermination (...) qu'à Gaza, avec des évacuations temporaires de Palestiniens".
Ezzat Rishq, un cadre du Hamas, y a vu un appel à "élargir la spirale des destructions et du génocide".
"C'est une guerre, et nous devons la gagner", a ajouté M. Katz, accusant l'Iran de vouloir "établir un front terroriste" en Cisjordanie, "sur le modèle de Gaza et du Liban", où le Hezbollah, grand allié de Téhéran, tire quasi quotidiennement des roquettes sur Israël depuis le 8 octobre.
L'armée israélienne avait annoncé avoir "éliminé" lundi soir cinq combattants palestiniens dans un raid aérien sur le camp de réfugiés de Nour Shams.
L'un d'eux, Jibril Jibril, "impliqué dans des activités terroristes (...) avait été libéré en novembre dans le cadre de l'accord" d'échanges d'otages enlevés le 7 octobre et emmenés à Gaza contre des prisonniers palestiniens incarcérés par Israël, a indiqué l'armée. Selon Wafa, deux des cinq morts de lundi étaient mineurs.
- "Annexer la Cisjordanie" -
Le Jihad islamique, mouvement islamiste palestinien allié du Hamas, a dénoncé une "guerre ouverte de l'occupant" israélien.
"Avec cette agression qui vise à transférer le poids du conflit à la Cisjordanie occupée, l'occupant veut imposer un nouvel état de fait sur le terrain pour annexer la Cisjordanie", a-t-il accusé.
De son côté, le Hamas, dont la popularité a grimpé en Cisjordanie depuis le début de la guerre à Gaza, tandis que celle du Fatah, le parti de M. Abbas, a chuté, a exhorté de nouveau mardi soir les trois millions de Palestiniens de Cisjordanie à se "soulever" contre l'occupation israélienne.
Dans la bande de Gaza, la Défense civile a fait état d'au moins 12 morts, dont au moins un enfant et une femme, dans de nouvelles frappes israéliennes sur le centre et le sud.
Des familles en détresse continuent de se déplacer au gré des ordres d'évacuation de l'armée israélienne qui se multiplient. L'un des derniers concerne les environs de l'hôpital des Martyrs d'Al-Aqsa, à Deir al-Balah (centre), que "près de 650 patients ont fui", rapporte mercredi Médecins sans Frontières (MSF).
Les médiateurs entre Israël et le Hamas, le Qatar, l'Egypte et les Etats-Unis, tentent d'arracher un cessez-le-feu assorti de la libération d'otages en échange de prisonniers palestiniens détenus par Israël.
Après des négociations au Caire, une délégation israélienne mène mercredi à Doha des discussions au "niveau technique" avec les médiateurs, selon une source au fait des négociations.
J.Gustafsson--RTC