En Arizona, un centre électoral s'est mué en forteresse
Des électrices républicaines franchissent des clôtures en fer forgé et des barbelés pour visiter non pas une prison mais le centre électoral du comté de , en Arizona.
Devant la salle où les votes de la présidentielle de novembre seront comptés, le responsable électoral accueille les membres des Ahwatukee Republican Women, une association de Phoenix.
"Nous savons qu'il y aura beaucoup de pression sur l'Arizona parce qu'on pourrait bien décider du sort du monde libre en novembre 2024, ici dans le comté de Maricopa", dit cet élu chargé de l'enregistrement des et des votes anticipés.
Les services de M. Richer ont proposé une centaine de visites des infrastructures de comptage et de dépouillement des bulletins de vote du comté depuis sa prise de fonctions en 2020, au moment où la victoire de Joe Biden contre Donald Trump était remise en cause jusqu'au point d'orgue de l'assaut du Capitole le 6 janvier 2021.
L'Arizona, perdu par Donald Trump pour environ 10.000 voix, s'est retrouvé au coeur des théories conspirationnistes sur le prétendu vol de l'élection au profit de M. Biden.
Lors d'une de ces visites, une femme républicaine questionne Stephen Richer, républicain lui aussi, au sujet d'un voisin ayant reçu, dit-elle, deux bulletins pour quelqu'un qui n'habite plus là. Une autre assure que des morts votent.
"Cela ne devrait pas arriver", leur répond le responsable, expliquant que le comté travaillait conjointement avec les autorités étatiques et fédérales pour mettre les listes électorales à jour et transmettre les cas litigieux à la justice.
"Cela ne devrait pas arriver, mais ça arrive", rétorque une visiteuse.
- Commandos d'élite -
Lorsque Fox News, la chaîne préférée des conservateurs, a déclaré que Joe Biden avait remporté l'Arizona en 2020, le fondateur du site InfoWars Alex Jones et une foule de manifestants armés s'étaient rendus devant le centre électoral, aux cris de "Arrêtez Joe Biden!" et "Comptez les votes légaux!".
Le comté a commencé à prendre des mesures pour renforcer la sécurité à l'approche des élections de mi-mandat en 2022, lors desquelles la candidate républicaine aux fonctions de gouverneure, Kari Lake, a refusé de concéder sa défaite face à la démocrate Katie Hobbs.
De meilleures caméras ont été installées, la présence de gardes armés a été renforcée, des portes ont été changées pour sécuriser certaines pièces, selon une liste des mesures obtenue par l'AFP.
En concertation avec le bureau du shérif du comté, des commandos d'élite sont maintenant présents sur le toit pendant les élections. Et les patrouilles, y compris à cheval, sont nombreuses.
Après avoir passé son badge sur le senseur d'une "zone sécurisée", Stephen Richer montre à ses visiteuses chaque étape du processus de comptage des voix, de la vaste salle où arrivent les bulletins de vote à la pièce où ils sont comptés, une opération diffusée en direct.
"Chaque année, on a des milliers et des milliers de paquets de bulletins dont on ne peut pas vérifier la signature", explique M. Richer, ajoutant qu'ils n'étaient donc pas comptabilisés.
Dans la "grande pièce" où les bulletins sont traités, les assesseurs ôtent toutes les informations permettant d'identifier les électeurs. Puis, ils sont stockés dans des cages fermées à clé.
Stephen Richer lui-même n'a pas accès à ces cages ou à la salle du comptage des voix, qui figurait en bonne place dans les récits sur le supposé trucage des élections en 2020 et 2022. Il n'y a pas de connexion internet et les gens qui y vont doivent être au moins deux.
Quant aux boîtes situées à l'extérieur du centre où l'on peut déposer des bulletins, elles sont "sous vidéosurveillance et on peut les regarder sur le site" du centre électoral, souligne M. Richer.
- "Petit truc" -
Les autorités du comté espèrent par ces visites rassurer les électeurs quant à l'intégrité du processus électoral avant le duel entre Kamala Harris et Donald Trump en novembre.
"La première chose que les gens entendent sur une élection, c'est celle dont ils se souviennent", juge Taylor Kinnerup, directrice de la communication du bureau de Stephen Richer.
Avant leur visite, les participantes ont rempli un questionnaire montrant qu'elles ne faisaient guère confiance aux assesseurs de Maricopa, selon les données recueillies par l'AFP. Une seule a dit qu'elle avait "un peu confiance".
Karen Deadrick, une enseignante de 69 ans, raconte à l'AFP que la visite l'a quand même rassurée.
"Je sais que beaucoup de gens entendront parler d'un petit truc et vont l'exagérer", dit-elle. "Le problème, c'est que les gens aiment bien amplifier les problèmes via internet."
O.Greco--RTC