Scores historiques en vue pour l'extrême droite dans l'est de l'Allemagne
L'extrême droite allemande s'apprête à atteindre des scores historiques dimanche dans deux scrutins régionaux dans l'est du pays, propres à fragiliser davantage le chancelier Olaf Scholz, dans un contexte tendu après l'attentat perpétré à Solingen.
Ces élections à valeur de test en Saxe et en Thuringe interviennent un peu plus d'une semaine après le triple meurtre au couteau imputé à un Syrien dans cette commune de l'ouest, qui a bouleversé le pays et relancé un vif débat sur l'immigration.
En Thuringe, l'un des plus petits Länder allemands où l'extrême droite est emmenée par Björn Höcke, l'une de ses figures les plus radicales, le parti Alternative pour l'Allemagne (AfD) pourrait s'imposer comme la première force politique, devant les conservateurs de la CDU.
Aussi bien l'AfD que le BSW séduisent par leur discours virulent contre l'immigration et en appelant à mettre un terme aux livraisons d'armes à l'Ukraine, position très populaire dans ces régions de l'ex-RDA communiste où la peur de la guerre reste profondément ancrée.
Vers 14H00 locales (12h00 GMT), 35,4% des quelque 3,3 millions d'électeurs en Saxe avaient déposé leur bulletin, soit légèrement plus qu'en 2019, et 44,4% des 1,7 million en Thuringe, où la hausse de la participation est plus nette, selon les autorités électorales locales.
Les premières estimations du vote sont attendues peu après la fermeture des bureaux, vers 18H00 locales (16H00 GMT).
Une victoire de l'AfD à un scrutin régional constituerait une première dans le pays depuis l'après-guerre, même s'il est improbable que la formation dirige un gouvernement, les autres partis refusant toute coalition avec lui.
Et elle enfoncerait encore un peu plus l'impopulaire gouvernement de coalition du chancelier avec les Verts et les libéraux du FDP, à un an des élections législatives de 2025.
- Scholz sous pression -
Son parti social-démocrate tombe autour de 6% dans les deux régions, selon les sondages.
Le chancelier est retourné à Solingen dimanche pour assister à une cérémonie d'hommage aux victimes.
"Ce crime nous touche au coeur, il nous met en colère", a-t-il déclaré sur son compte X. "Nous devons aux victimes et à leurs proches d'en tirer les conséquences".
Les dirigeants de l'AfD ont cherché à capitaliser sur le choc suscité par cette attaques, accusant les gouvernements fédéraux successifs d'avoir semé le "chaos".
L'assaillant présumé, soupçonné de liens avec l'organisation djihadiste Etat islamique (EI), avait réussi à se soustraire à une décision d'expulsion.
Sous pression, le gouvernement Scholz a annoncé un durcissement des règles du port d'armes et du contrôle de l'immigration.
- "Catastrophe" -
L'ambiance "n'est pas bonne parce que beaucoup craignent que l'AfD l'emporte et ce serait une catastrophe pour la Thuringe", témoigne auprès de l'AFP Astrid Radefeld à la sortie d'un bureau de vote à Erfurt. L'enseignante de 53 ans dit redouter en particulier des atteintes à la liberté d'expression si l'extrême droite étendait son pouvoir.
Le parti, essentiellement eurosceptique à sa création en 2013, s'est radicalisé après la grande crise migratoire de 2015, la pandémie de Covid-19 puis la guerre russe en Ukraine qui a affaibli la première économie européenne et fait flamber l'inflation.
Il a remporté plusieurs succès électoraux ces derniers mois, obtenant le meilleur score de son histoire aux européennes de juin.
L'ex-RDA s'est avérée un terrain fertile, en raison d'inégalités persistantes depuis la réunification en 1990 et d'une profonde crise démographique, malgré une attractivité économique retrouvée.
Pour Ursula Münch, directrice de l'Académie pour l'éducation politique de Tutzing (sud), "l'AfD est devenu une normalité à l'est", un peu "comme en France, où le Rassemblement national est devenu peu à peu quasiment la norme".
E.Persson--RTC