Automobile: l'UE rassemble les constructeurs pour relancer la filière
L'Union européenne lance jeudi une vaste concertation avec le secteur automobile, afin de relancer des constructeurs européens en grande difficulté pour passer le cap de l'électrification des véhicules face à la concurrence chinoise.
Bruxelles doit composer entre ses ambitions environnementales et les appels à l'aide du secteur. En plein tournant pro-business, la Commission a promis dès mercredi des "flexibilités" pour répondre à "l'urgence".
L'exécutif semble prêt à épargner les constructeurs européens qui risquaient des amendes en cas de non-respect des objectifs de réduction des émissions de CO2 en 2025.
Outre les constructeurs, plusieurs Etats dont l'Allemagne, la France et l'Italie s'opposent à ces amendes, au grand dam des ONG environnementales.
Initié par la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, ce "dialogue stratégique" sur l'avenir de l'automobile doit réunir durant plusieurs mois constructeurs, équipementiers, ONG et représentants des consommateurs.
L'automobile européenne est frappée de plein fouet par la concurrence de la Chine. Et l'arrivée au pouvoir de Donald Trump aux Etats-Unis laisse craindre une explosion des droits de douane sur les voitures du Vieux continent.
Comme un symbole, l'usine Audi de Bruxelles (groupe Volkswagen) s'apprête à cesser sa production fin février. Elle fabriquait un modèle haut de gamme de voiture électrique, mais les ventes de ce SUV sont en baisse et la direction met en avant "des coûts de production élevés" dans la capitale belge.
Face à la crise, la Commission promet d'accompagner un secteur qui emploie quelque 13 millions de personnes au sein de l'UE et représente environ 7% de son PIB.
De premières mesures pourraient être annoncées fin février afin de soutenir les achats de voitures électriques pour les flottes d'entreprises ou tenter de sécuriser les chaînes d'approvisionnement en matières premières.
- "Déjà en retard"
Le précédent mandat d'Ursula von der Leyen a été marqué par les ambitieuses mesures du Pacte vert (Green Deal), et son emblème: l'interdiction à la vente des véhicules thermiques neufs en 2035.
"Nous voulons maintenir cet objectif", a assuré mercredi Ursula von der Leyen, tout en accompagnant les entreprises dans cette "transition très complexe".
Jusqu'ici, le totem de 2035 n'a pas été frontalement remis en cause à Bruxelles. Mais la pression monte du côté des constructeurs et d'une partie de la classe politique.
Au Parlement, la droite européenne demande des aménagements et l'extrême droite appelle à "suspendre le Green Deal".
Les organisations environnementales s'alarment. Lucien Mathieu, de Transport et Environnement (T&E), redoute un mauvais signal qui inciterait les constructeurs européens à "ralentir", alors qu'ils "sont déjà en retard" en matière de véhicules électriques, souligne-t-il auprès de l'AFP.
En Europe, la part des voitures électriques dans les ventes a baissé pour la première fois depuis l'envol du marché en 2020: 13,6% en 2024 contre 14,6% en 2023.
Pendant ce temps, la Chine, pionnière mondiale, a vendu 11 millions de véhicules électriques en 2024, un chiffre en hausse de 40% sur un an.
L'UE a engagé un bras de fer commercial avec Pékin, à qui elle reproche d'avoir artificiellement dopé sa filière électrique à coups de subventions publiques.
Malgré l'hostilité de l'Allemagne, Bruxelles a ainsi décidé fin octobre d'ajouter aux 10% de taxes déjà en place une surtaxe allant jusqu'à 35% sur les voitures à batterie de fabrication chinoise.
Mais en Europe, "l'ampleur des investissements et le rythme de l'innovation sont restés à la traîne", déplore un récent rapport de l'Institut Jacques Delors, particulièrement dans le domaine de la fabrication de batteries.
"La Chine devrait contrôler les deux tiers de la production mondiale de batteries d'ici à 2030", estime cet institut, qui appelle l'UE à "augmenter sa production assez rapidement".
G.Stewart--RTC