

Emmanuel Macron à Mayotte, toujours meurtri par le cyclone Chido
Emmanuel Macron est arrivé lundi matin à Mayotte, encore meurtri par le passage dévastateur du cyclone Chido en décembre, pour faire le point sur la reconstruction de l'archipel et présenter un plan de "refondation" de ce département le plus pauvre de France.
Le chef de l'Etat, accompagné de son épouse Brigitte, a atterri à 08H15 locales (07H15 heure de Paris) à Mamoudzou, chef-lieu du département, pour la première étape d'une tournée de cinq jours dans l'océan Indien (Mayotte, Réunion, Madagascar et Maurice).
"Je veux rendre hommage à la force de résistance de tout le peuple mahorais", a déclaré à la presse le président, peu après sa descente d'avion.
"On a répondu à l'urgence extrême. Maintenant, je suis là pour faire le constat de ce qui est bien fait, ce qui n'est pas assez bien fait, pour donner un coup d'accélérateur", a-t-il ajouté. Il est accompagné des ministres des Outre-mer Manuel Valls, de l'Agriculture Annie Genevard, de la Santé Yannick Neuder et de la Francophonie Thani Mohamed-Soilihi.
Le président arrive avec un projet de loi de programmation pour "la refondation" de l'archipel, qui vise à renforcer la lutte contre l'immigration clandestine, l'habitat illégal, l'insécurité et à soutenir l'économie locale.
Ce texte, très attendu depuis plusieurs années par les élus mahorais, sera entériné dans la soirée par un Conseil des ministres spécial que le chef de l'Etat présidera en visioconférence depuis l'avion qui le mènera ensuite de Mayotte à La Réunion.
"On ne réglera pas tous les problèmes par un seul texte", a-t-il reconnu lundi, mais il faut "une mobilisation au-delà de la phase d'urgence pour régler les problèmes de fond" auxquels est confronté l'archipel, notamment le défi migratoire en provenance des Comores.
Durant une dizaine d'heures, Emmanuel Macron va aller à la rencontre de la population, des représentants de la filière agricole avant de s'entretenir avec les élus mahorais.
- "On en a marre" -
Quatre mois après le cyclone qui a fait 40 morts et causé 3,5 milliards d'euros de dommages, il risque de se retrouver confronté aux mêmes frustrations qu'en décembre alors que les défis de la reconstruction restent colossaux.
Les réseaux d'eau, d'électricité et de télécommunications ont été rétablis en urgence. Mais les Mahorais attendent le début des grands chantiers.
Le Parlement a certes adopté en février une loi d'urgence qui prévoit des assouplissements aux règles d'urbanisme et des facilités fiscales pour booster la reconstruction.
Mais entre manque de financements, coordination laborieuse et pénurie de matériaux, le processus patine. Et les habitations de fortune en tôle sont réapparues aussi vite qu'elles avaient été soufflées.
Environ un tiers de la population, soit plus de 100.000 habitants, notamment les personnes en situation irrégulière venant des Comores, vivent dans des logements précaires.
"On en a tous marre", "rien n'a changé", lâche Alexandre Grau, qui a perdu son toit à Tsingoni. "Tout va très lentement", confirme Julian Champiat, président de la Fédération mahoraise du BTP.
- "Dans la merde !" -
Mayotte, où Marine Le Pen a réalisé un de ses meilleurs scores à la présidentielle de 2022 (59% au second tour), reste aussi un enjeu politique majeur.
"Les Mahorais ne peuvent plus attendre: l'Etat doit urgemment venir en aide à ce territoire français!", a martelé sur X le RN avant la visite présidentielle.
En décembre, le chef de l'Etat s'était agacé des critiques.
"Si c'était pas la France vous seriez 10.000 fois plus dans la merde !", s'était-il emporté devant des jeunes et des mères de famille qui lui reprochaient de "raconter ses salades".
Il avait alors assuré vouloir "renforcer la lutte contre l'immigration clandestine" en augmentant, jusqu'à presque doubler, le nombre de reconduites à la frontière, qui était de 24.500 en 2023.
Le projet de loi prévoit de durcir les conditions d'obtention du titre de séjour dans l'archipel ainsi qu'une extension de l'aide au retour volontaire.
Il entend aussi faciliter les évacuations d'habitats insalubres dans les bidonvilles et les saisies d'armes dans un département à l'insécurité rampante.
Mayotte, où le taux de chômage atteignait 37% et le niveau de vie restait sept fois plus faible qu'ailleurs en France avant le passage de Chido, doit devenir une zone franche globale, avec des abattements fiscaux à 100%.
Le projet de loi prévoit aussi l'alignement des droits sociaux et des conditions de travail sur ceux de la métropole. Les minima sociaux, comme le RSA, y sont aujourd'hui 50% inférieurs.
Ch.Jacobs--RTC