Malgré de sévères revers électoraux, Boris Johnson refuse de démissionner
Deux défaites à des législatives partielles -- l'une dans une zone tenue depuis plus d'un siècle par les conservateurs -- ont porté un nouveau coup sévère à l'autorité du Premier ministre britannique Boris Johnson, qui exclut de démissionner.
Moins de trois semaines après avoir survécu difficilement à un vote de défiance, le dirigeant voit de nouveau s'éroder la confiance de sa majorité en sa capacité à la maintenir au pouvoir.
La perte des circonscriptions Tiverton et Honiton, au sud-ouest de l'Angleterre, et de Wakefield, dans le nord, a aussi causé la démission du loyal président du Parti conservateur, premier départ du "cabinet" réunissant les principaux ministres depuis qu'a éclaté le scandale du "partygate", ces fêtes arrosées à Downing Street pendant les confinements.
"Je ne vais pas prétendre que ce sont des résultats brillants, nous devons écouter, nous devons apprendre", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse depuis Kigali au sommet du Commonwealth, promettant de déployer "une énergie totale" face à la crise du coût de la vie pour les Britanniques.
Après le Rwanda, Boris Johnson doit se rendre aux sommets du G7 et de l'Otan qui vont l'éloigner de Londres pendant encore une semaine.
Dans deux circonscriptions au profil très différent, les libéraux-démocrates (centristes) ont conquis confortablement leur bastion rural de Tiverton et Honiton tandis que le Labour, principale formation d'opposition, a récupéré Wakefield, ville affectée par la désindustrialisation et fief traditionnellement travailliste ravi par les Tories fin 2019.
Ces humiliantes défaites "sont les dernières d'une série de très mauvais résultats pour notre parti", a écrit le président du Parti conservateur, Oliver Dowden dans sa lettre de démission.
Les votes ont eu lieu jeudi après deux démissions d'anciens députés conservateurs: l'un condamné pour l'agression sexuelles d'un adolescent, l'autre pour avoir regardé de la pornographie sur son téléphone au Parlement.
Ces résultats risquent d'accentuer encore davantage le climat de défiance au sein de la majorité, dans un contexte de tensions sociales croissantes provoquées par l'inflation (plus de 9%).
L'ancien leader du Parti conservateur Michael Howard a estimé que Boris Johnson devrait démissionner. "Le parti, et plus important encore le pays, se porteraient mieux sous une nouvelle direction", a-t-il déclaré à la BBC.
Mais selon le Pr Tony Travers, de la London School of Economics and Political Science, Boris Johnson "s'accrochera". "Pour lui, rester à son poste est la principale priorité, plutôt que de protéger le parti conservateur sur le long terme", a-t-il déclaré à l'AFP.
- Pas de successeur évident -
Les deux députés nouvellement élus l'ont également exhorté à démissionner, affirmant que les Britanniques n'ont plus confiance en lui.
Le chef de l'opposition Keir Starmer, qui espère remplacer M. Johnson au poste de Premier ministre après les prochaines législatives prévues en 2024, a estimé que les conservateurs étaient "déconnectés, à court d'idées", ajoutant que "s'ils avaient la moindre décence, ils partiraient".
Le Premier ministre lutte depuis des mois pour sa survie politique après une série de controverses. Avant même que le "partygate" n'éclate en décembre dernier, l'architecte du Brexit, âgé de 58 ans, a perdu deux sièges autrefois sûrs lors d'élections partielles l'année dernière. Il a ensuite obtenu un score lamentable lors des élections locales de mai.
Quelques semaines plus tard, des dizaines de députés conservateurs ont déclenché un vote de défiance à l'encontre de M. Johnson, et plus de 40% d'entre eux ont tourné le dos à leur chef de file en difficulté.
Le contexte lui est peu favorable, avec une inflation au plus haut depuis 40 ans à l'origine d'une grève massive des cheminots, et l'échec récent d'une tentative controversée d'expulser des migrants vers le Rwanda.
Mais les conservateurs manquent d'un successeur évident se détachant, ce qui fait hésiter une partie de la majorité à évincer son leader, longtemps très aimé du public mais désormais très impopulaire.
T.Cortez--RTC