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Athlétisme: Steve Prefontaine, légende éternelle de Eugene
Athlétisme: Steve Prefontaine, légende éternelle de Eugene / Photo: - - EPU/AFP/Archives

Athlétisme: Steve Prefontaine, légende éternelle de Eugene

Une épaisse moustache, chevelure blonde au vent, la vie brûlée à fond, comme il aimait courir: Steve Prefontaine, légende de la course à pied américaine décédée prématurément il y a près de 50 ans, reste indissociable de la ville hôte des Mondiaux-2022 d'athlétisme, Eugene, imprégnée de ses exploits et de sa personnalité unique.

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"Il était magnétique". La description succincte vient de Ralph Mann, l'un des amis de Steve Prefontaine, relayée dans le livre "Pre, histoire de la plus grande légende de la course à pied américaine, Steve Prefontaine", de Tom Jordan (1977, réédité en 1997, Rodale).

Au début des années 1970, les allures folles et la souffrance imposée à ses adversaires par l'athlète au regard sombre électrisent les foules.

"Pre" s'impose surtout comme une star universitaire à la tête des Ducks de Eugene, dans l'Oregon, avec qui, quasi invincible en cross ou sur la piste, il multiplie victoires et records des Etats-Unis du 3.000 au 10.000 m.

En 1972, c'est dans son antre du Hayward Field, théâtre des Mondiaux-2022 à partir de vendredi, qu'ont lieu les sélections américaines pour les Jeux olympiques de Munich.

"Le bruit de ce dernier tour restera à jamais gravé dans ma mémoire", écrit sur son blog le journaliste américain Mark Cullen, alors jeune étudiant aux premières loges pour assister à la victoire de l'idole locale sur le 5.000 m.

"Le grondement était assourdissant alors que Prefontaine courait la dernière ligne droite. Mais l'explosion quand il a franchi la ligne, je n'ai plus jamais rien entendu de pareil."

- "A vive allure" -

Prefontaine s'envole à Munich, où, fidèle à sa réputation, il mène un train d'enfer en finale du 5.000 m, mais termine seulement 4e. Jamais il ne montera sur un podium olympique, ce qui explique son relatif anonymat hors des Etats-Unis.

"Je me souviens de lui, de sa moustache. C'était un +front runner+ comme on disait. Il aimait comme moi mener la course à vive allure, on se comprenait bien les deux sur la piste", raconte à l'AFP le Belge Emiel Puttemans, 5e du 5.000 m à Munich avant de décrocher l'argent du 10.000 m.

"C'était un chouette type, il était venu une année à Louvain pour une course montée par mon club, on avait partagé quelques Stella (bière, ndlr) en soirée."

Grand amateur de houblon, "Pre" laisse une marque plus profonde que sur le seul tartan, malgré une vie express. L'amateur de voitures de sport décède dans un accident nocturne en mai 1975 à 24 ans au volant d'une clinquante roadster convertible MGB bleue.

Sorte de James Dean de la course à pied, à qui la tragédie a accordé la jeunesse éternelle, Prefontaine se bat pour imposer ses convictions, notamment pour mettre fin au statut amateur des athlètes, qui ne pouvaient toucher de l'argent grâce au sport sous peine d'être privés d'équipe nationale et de JO.

La légende veut que Prefontaine, relativement précaire malgré son statut, quitte chaque jour à six heures du matin sa caravane posée au bord de la rivière Willamette, soirée arrosée ou pas, pour un premier footing jamais plus lent que 15 km/h.

- "Durs à cuire" -

"Quand je pense à l'Oregon, je pense à cette force des colons: des durs à cuire, inflexibles, directs. C'était tout à fait Pre", résume son ami Frank Shorter, champion olympique du marathon à Munich, et dernier adversaire sur la piste du phénomène quelques heures avant sa mort.

Le fort caractère de Prefontaine s'est forgé à Coos Bay, petit ville au bord du Pacifique, où l'une de ses deux soeurs, Linda, propose encore une sortie touristique payante "sur les traces" de son frère.

Entre ses petits boulots à la station essence, comme maître-nageur ou pour une assurance locale, c'est dans cette bourgade qu'il se découvre un talent pour l'effort long et violent de la course.

"Son talent résidait dans sa résistance à la fatigue, et à la douleur. Son seuil de souffrance était différent des autres, sans que je sache si c'était inné ou venu à force d'efforts", raconte son entraîneur au lycée Walt McClure.

A l'Université, Prefontaine est coaché par une autre légende de l'Oregon, Bill Bowerman, qui dessine des chaussures pour la jeune entreprise locale Nike, pour laquelle le coureur fera un temps office de chargé de relations publiques.

Devenue une puissante firme internationale, Nike a largement contribué à relayer une légende sans fausse note de Prefontaine, l'un de ses emblèmes. Deux films très hollywoodiens lui ont été consacrés, "Prefontaine" (1997, Steve James), avec l'acteur Jared Leto, et "Without limits" (1998, Robert Town).

Près de 50 ans après sa mort, le meeting annuel américain de la Ligue de diamant porte son nom, dans son stade. Les inconditionnels continuent de déposer maillots, dossards et chaussures de course au "Pre's rock", sur les lieux de son accident.

G.Svensson--RTC